Ce roman est le deuxième volet d'un triptyque composé de La Cavalière Elsa et du Quai des Brumes. Les paysans, déjà sortis vainqueurs de la guerre qui opposait la France à la Russie des Soviets dans La Cavalière Elsa, accèdent au pouvoir. La charge contre la paysannerie et sa cupidité semble héritée de La Terre, de Zola, mais la description de la « force irrésistible » que sont les paysans met en lumière d'autres forces en présence. Suivant le cycle des saisons, ce roman effectue un constat pessimiste : la neige du dernier chapitre est obscurcie par la présence d'une croix noire sur laquelle est clouée Claude, cette colporteuse sillonnant les campagnes française et belge, et qui se révèle être « Nadia Blummenfeld, ministre de la Propagande » soviétique. Son amant, Nicolas Gohelle, semble un double de Mac Orlan, comme lui citadin et intellectuel exilé à la campagne. La « force cérébrale » de Gohelle, dont les considérations notées sur un carnet émaillent le roman, se confronte tant à la force politique des paysans réactionnaires qu'à celle des communistes. Portrait de l'inquiétude de l'entre-deux-guerres face aux périls rouge et paysan, ce roman est aussi un manifeste pour l'intelligence et l'imagination, à l'heure où les « Malgras », ces intellectuels au chômage, errent dans les campagnes. Véritable « force pourrie », ils semblent la préfiguration de ces loups qui, à la fin du roman, envahissent le pays.
Zacharie Signoles