L'édition originale de ce texte remonte à 1934, quand il fut publié sous le titre La Nuit de Zeebrugge. Cette nuit fut celle du 22 avril 1918, célèbre dans les annales de la marine anglaise pour le raid sanglant qu'elle lança contre les ports d'Ostende et de Zeebrugge. En effet, ces deux ports étaient les débouchés maritimes de canaux conduisant à Bruges, ce port intérieur constituant la principale base des sous-marins et des torpilleurs allemands qui attaquaient les convois alliés. La Royal Navy décida donc de faire entrer des navires piégés dans ces canaux afin de rendre la base de Bruges inutilisable. L'opération, extrêmement délicate, exigea une longue préparation basée sur les informations transmises par des agents secrets. Le raid lui-même fut très sanglant car une force de débarquement devait prendre d'assaut la grande jetée de Zeebrugge, afin de faire diversion pendant qu'un sous-marin et cinq croiseurs légers se glisseraient dans le canal où ils seraient coulés.
Ces précisions militaires sont indispensables pour bien cerner le propos de Mac Orlan. Quelques années après la guerre, un homme revient sur les lieux de la bataille, en quête de réponse à une interrogation : y aurait-il eu trahison ? La réponse se trouve quelque part dans les rues calmes ou sur les quais de Bruges au pied du beffroi ; ou encore sur les immensités de dunes qui courent entre Ostende et Zeebrugge.
Dominique Le Brun (In: Mac Orlan, Romans maritimes, Ed. Omnibus)